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Discours prononcé en hommage à Zaïnaba Saïd-Anzum

Publié le vendredi 31 octobre 2025

Cher•es collègues, cher•es ami•es,
Cher•es habitant•es,

Mesdames, Messieurs,

C’est avec une peine immense, une émotion indicible, que nous nous réunissons aujourd’hui pour rendre hommage à Zaïnaba Saïd Anzum.

A vous, sa famille à laquelle nous pensons tant.

A toi Kader, son mari, vous ses trois enfants Marwane, Daris et Maya. A vous ses parents, ses frères et soeurs. Devant toutes ces personnes réunies, je veux vous dire ce que représentait Zainaba. Avec l’espoir de vous accompagner au mieux dans cette épreuve. Avec l’espoir de vous entourer de tout notre amour et notre fidélité pour les années à venir.

Car Zainaba c’était notre amie, notre collègue, notre sœur d’engagements. Il y a ici une grande famille de cœur. Habitants de La Courneuve, de Dugny, du Bourget et plus largement de la Seine-Saint-Denis, élus, militants associatifs ou politiques, entrepreneurs, acteurs sportifs. Nous nous réunissons pour lui rendre hommage.

Sa disparition brutale laisse un vide immense. Mais Zainaba laisse une trace particulière: celle d’une femme debout, d’une femme courage, d’une militante infatigable, d’une camarade fidèle.

Je la vois encore, il y a 17 ans, passer les portes de la section du parti socialiste de La Courneuve pour y adhérer. C’était en 2008, après les élections municipales, la bataille électorale était derrière nous. Elle a poussé la porte avec cet état d’esprit qui la caractérise tellement : elle n’était pas de celles et ceux qui volent au secours de la victoire, ou celles et ceux qui poussent du col pour occuper la première place. Elle est venue quand c’était difficile, et elle est rapidement devenue un pilier de notre action militante. Car, elle avait cette force tranquille, cette détermination qui inspire le respect.

Elle avait cette façon rare de parler sans jamais juger, d’agir sans jamais chercher à s’imposer, d’aider sans jamais attendre. Son humilité était une force, son sourire, quelle que soit la circonstance, un langage universel.

Il fallait toujours batailler auprès d’elle pour lui proposer des responsabilités quand d’autres les prennent pour un dû et les réclament à cor et à cris. Rapidement, sa légitimité a été une évidence pour moi. Elle devient ma suppléante aux élections cantonales en 2011 et naturellement co-titulaire aux élections départementales de 2015 et 2021 sur le nouveau canton de La Courneuve-Le Bourget-Dugny.

Zaïnaba, s’est mise au service de notre collectif. A La Courneuve, en tant qu’élue municipale bien sûr. D’abord comme adjointe aux transports et aux mobilités, puis comme adjointe à la santé et au handicap.

A La Courneuve, tu faisais partie d’un collectif profondément uni. Dans ce collectif, tu comptais. Par ta rigueur, par ton sens du travail bien fait et ta capacité à tisser des liens d’amitié et de confiance qui dépassaient les fonctions et les mandats.

Tu étais de tous les combats, de toutes les actions militantes, de toutes les réunions. On pouvait te croiser à 8h devant une école pour diffuser des tracts et le soir même au Conseil d’Administration d’un collège ou en réunion de quartier. Tu étais aussi à l’aise avec les personnes âgées des 4 routes qu’avec les jeunes du quartier des 4000.

Tu recevais de multiples sollicitations à chaque coin de rue et, comme moi, tu les notais toutes : besoin d’une réparation dans un HLM, un rendez-vous impossible à obtenir en préfecture, un renseignement sur un dispositif de subvention pour une association ou un club sportif, la carte améthyste qui n’arrive pas assez vite… Tu gardais une attention scrupuleuse sur le suivi de ces dossiers. Jamais pour obtenir je ne sais quel passe-droit, mais pour faire valoir les droits et la dignité des habitantes et des habitantes.

L’histoire que nous avons écrite ensemble, ici à La Courneuve, doit aussi beaucoup au binôme que vous avez su former avec Oumarou Doucouré. Cette relation unique entre vous deux montre que l’amitié et la fraternité en politique ne sont pas de vains mots. Oumarou venait d’ailleurs de te passer il y a quelques mois le flambeau du secrétariat de la section socialiste. Je sais sa peine. Je veux lui dire mon amitié et mon affection pour surmonter ensemble cette perte.

Au Département, après qu’elle ait assumé avec brio la fonction de présidente du groupe socialiste au cours du précédent mandat départemental, Zainaba devient conseillère départementale déléguée aux sports à partir de 2021.

Et, quel beau choix. Ce mandat aux sports, Zaïnaba y a apporté non seulement une énergie déterminée mais aussi une conviction ferme : que le sport n’est pas seulement une pratique, mais un levier pour changer des vies, pour ouvrir des horizons, émanciper les individus et créer du lien au-delà de nos différences.

Elle avait vu dans les grands événements, la Coupe du monde de rugby bien sûr, mais aussi surtout les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, une opportunité de faire rayonner la Seine-Saint-Denis aux yeux du monde et d’ouvrir grandes les portes du sport à toutes et tous.

Zaïnaba croyait profondément à la force du collectif, à ce que le sport peut apporter aux jeunes souvent confrontés à l’injustice ou à la relégation : la confiance, la solidarité, la discipline, la joie de se dépasser. Elle y a vu aussi une émancipation pour les femmes, une affirmation de leur liberté de choix.

Que de beaux moments nous avons vécu ensemble lors de ces Jeux. Zainaba était heureuse. Heureuse d’un sport à l’honneur, heureuse des valeurs qu’il a portées.

Mais, Zainaba savait qui elle représentait. Si elle aimait à écouter régulièrement encore « Parade », l’hymne officiel des Jeux, son hymne à elle c’était plutôt « Seine-Saint-Denis-Style » du groupe NTM qu’elle faisait régulièrement résonner dans les couloirs du Département. Ses stars à elle, c’était moins Léon Marchand ou Félix Lebrun, que Rafik Arabat, qui après les Jeux a trouvé son nouveau terrain d’entraînement au PRISME, Prithika Pavade, Aurélien Diesse ou Djelika Diallo, des enfants de Seine-Saint-Denis qui ont brillé aux yeux du monde entier.

Car, oui, Zaïnaba ne s’excusait pas d’être du 93. Elle en était fière. Fière de ses quartiers, de ses habitants, de cette énergie unique qui fait notre force. Elle n’acceptait ni les caricatures, ni les condescendances, ni ces regards extérieurs qui trop souvent réduisent notre département à ses difficultés plutôt qu’à ses talents.

Zaïnaba représentait une Seine-Saint-Denis debout, digne, confiante, qui n’a plus besoin de se justifier. Une Seine-Saint-Denis qui assume ses combats et qui revendique sa place pleine et entière dans la République.

Elle avait fait de ce beau territoire son terrain de jeu. Il n’y pas une ville, pas un comité départemental, pas un club soutenu par le Département, qu’elle ne soit allée visiter, allée soutenir dans les victoires comme dans les défaites.

Elle n’a pas hésité aussi à bousculer. Lorsqu’il fallait être plus ambitieux sur le sport féminin ou le développement du para-sport, deux combats qu’elle a portés avec force.

Elle pouvait compter sur une équipe dévouée et sur de grands professionnels au service des sports du Département, je pense à la douleur d’Aurélie Gautier, cheffe du service des sports, à cet instant, qui était une véritable famille de travail, soudée par la confiance, le respect et l’affection réciproque.

Ce que je dis de Zaïnaba aujourd’hui n’est pas seulement le reflet de mon affection et de mon chagrin. Ces mots, je les ai entendus partout ces derniers jours. Chez toutes celles et ceux qui l’ont connue, dans tous les cercles où elle a agi, travaillé, milité, partagé.

Des élus de La Courneuve, de Dugny et du Bourget, de toute la Seine-Saint-Denis, de toute la région m’ont écrit, bouleversés. Des citoyennes et des citoyens ont envoyé des messages empreints de tendresse et de reconnaissance. Des entrepreneurs, des chefs d’établissements, des enseignants,…Le mouvement sportif, qu’elle soutenait avec passion, ont rappelé combien sa présence et sa disponibilité comptaient pour eux. La ministre des Sports elle-même, plusieurs de ses prédécesseurs, l’ambassadrice de Palestine, des responsables syndicaux, des partenaires institutionnels, la présidente de région, le président de la Métropole du Grand Paris, celui de Plaine commune, le premier secrétaire du Parti Socialiste, toutes et tous ont tenu à dire leur admiration, leur respect, leur peine.

Cette vague d’émotion dit beaucoup. Elle dit qu’au-delà des mandats, au-delà des appartenances politiques, Zaïnaba avait su toucher le cœur des gens.

Alors, je me suis demandé pourquoi. Pourquoi cette si grande vague d’émotions ?

Et, j’ai compris car je me suis souvenu. Je me suis souvenu des mots de réconforts dans les moments difficiles, des messages d’encouragement avant une échéance importante. Zainaba, derrière ses « checks » à la place d’une embrassade, derrière sa sérénité à toute épreuve, n’oubliait pas les personnes derrière les fonctions, les individus dans la grande aventure collective. Zainaba était bienveillante.

Elle était bienveillante et profondément respectueuse de l’autre. Zainaba écoutait avant de parler. C’est précieux. Elle aimait le combat politique, elle y prenait toute sa part mais elle détestait quand il tournait au pugilat et aux attaques personnelles, parfois violentes notamment sur les réseaux sociaux. Comme cette fois où elle avait été très affectée d’être prise pour cible quand elle prit la défense du centre municipal de santé et de ses professionnels mis en cause par un patient.

Je comprends aujourd’hui d’où venait la force de Zainaba. Je crois qu’elle l’a puisée dans sa détermination à ne rien sacrifier, à être la femme forte et à mener de front vie familiale, vie professionnelle et vie politique et militante. Elle a tout mené de front.

Tu étais un pilier de ta famille que tu aimais tant. Tu as été l’élue engagée sans jamais oublier la militante de terrain.

Zainaba, tu as été un roc de bienveillance et d’engagement pour toutes les personnes que tu as croisées.

Et pour ta famille, pour ton mari, tes enfants, tes parents, tes frères et soeurs. La douleur est telle qu’il est difficile d’énoncer des conseils. Vous pouvez puiser dans la force de votre mère, votre fille, votre sœur, votre épouse. Vous pouvez puiser dans son attention aux autres pour faire fuir la colère que cette injustice provoque. Vous pouvez puiser dans vos souvenirs pour retrouver le sourire.

J’ai en tête celui de ton fils Marwane qui t’accompagnait souvent dans tes pérégrinations et qui s’était pris d’admiration pour Amina Tounkara, ex-gardienne de handball au plus haut niveau devenue aujourd’hui responsable associative pour le développement du sport féminin. Marwane a présenté son parcours exemplaire à son oral du brevet. Il a obtenu la note de 20/20.

Zainaba sera fière de vous, de votre force et votre dignité. Vous pouvez compter sur une grande communauté humaine. Nous sommes avec vous.

Zaïnaba. Tu as rejoint les étoiles de ta ville de Foumbouni aux Comores, mais tu continueras longtemps à éclairer nos routes ici en Seine-Saint-Denis. Nous te promettons de continuer, ensemble, à faire rayonner cette Seine-Saint-Denis que tu aimais tant, avec le même cœur, la même force, la même fidélité, la même humanité.

Tu seras là dans les stades où rient les enfants, dans les piscines où l’on apprend à nager, dans les visages de toutes celles et ceux qui croient encore que la politique peut être une main tendue, un regard bienveillant, une promesse tenue.

Merci chère Zaïnaba.


Repose en paix.