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Élections américaines : une nouvelle inquiétante pour les USA et le Monde, une alerte pour la Gauche française

Publié le jeudi 10 novembre 2016

La campagne menée par Donald Trump s’est illustrée par un torrent d’insanités. Ont ainsi été pris pour cible de manière régulière au cours de celle-ci les immigrés (« un danger »), les musulmans (assimilés à «  des terroristes »), les mexicains (décrits comme «  des violeurs et des trafiquants de drogue »), les femmes (pour résumer ses propos : « des objets ») et les noirs (traités « d’incultes »), mais aussi et bien sûr l’ « establishment » tant politique que médiatique.

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Le candidat républicain a incontestablement surfé sur la question identitaire, la peur du déclassement et de l’ouverture, promettant aux américains le retour de la grandeur perdue des Etats-unis, comme en témoigne son slogan « Make America Great Again ». Cette stratégie n’est pas sans rappeler d’autres campagnes récentes telles que celle qui a été orchestrée dans le cadre du « Brexit » au Royaume-Uni. Une fois les résultats connus, les partisans de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne ont, sans ciller, reconnus que les promesses chiffrées qu’ils avaient avancées étaient, en fait, irréalisables. Espérons que celles de D.Trump, à savoir la remise en cause de la participation des Etats-Unis à l’Accord de Paris (COP21), la construction d’un mur à la frontière mexicaine ou encore l’interdiction des musulmans d’entrer aux Etats-Unis soient, de la même manière, inapplicables.

L’Europe, et en particulier la France ne sont pas à l’abri et ce résultat est une nouvelle alerte pour tous les responsables politiques, en particulier à gauche.

D’ores et déjà, il est possible d’observer dans les discours de certains responsables politiques une volonté similaire de viser certaines catégories de personnes, de s’en prendre à un « système » politico-médiatique voire à succomber à des thèses complotistes. La France est, certes, habituée à ce que ce genre de campagnes agressives et mensongères soient portées par l’extrême-droite. Moins, en revanche, que des partis dits « républicains » s’en fassent le relai. La victoire de D.Trump doit agir comme un avertissement pour la gauche française.

A l’instar du 21 avril 2002, les sondages des instituts ont été démentis et les garde-fous traditionnels que représentent les médias n’auront que peu pesé sur le résultat des élections. Les « experts » politiques eux-mêmes jugeaient impensable la victoire de D.Trump à la présidence des Etats-Unis. Et pourtant, la stratégie du pire vient d’être adoubée et légitimée par les urnes. Nous devons combattre les discours de haine d’où qu’ils viennent et ne pas les laisser dominer la vie politique française. Il est certain que la victoire de Trump galvanisera les plus extrêmes de nos politiques, et qu’ils chercheront à plagier la campagne victorieuse du nouveau président américain. Ils tenteront de s’adresser aux plus démunis et aux résignés, tout en misant sur la division. Nul doute que les quartiers populaires en feront les frais. Déjà, ils sont mis en concurrence avec le monde rural, comme si la République devait choisir qui, entre ses enfants, mérite son soutien et sa reconnaissance. Nous devons refuser ces murs que les réactionnaires promettent de construire, car ce n’est pas en dressant des barrières entre les Hommes que l’ont fait progresser un pays : faut-il que l’histoire nous le rappelle brutalement pour s’en souvenir ?

Face à ce déferlement de haine, il ne faut rien céder sur le terrain des valeurs, porter haut et fort celles d’une gauche décomplexée : la solidarité et l’égalité.

Mais, l’élection de D.Trump nous oblige aussi à nous interroger sur la portée du discours « anti-système » et « anti-mondialisation ». Les ressorts de ce vote portent leur part de contradiction puisque D.Trump est, à l’évidence, lui-même tout en haut du fameux système qu’il dénonce et qu’il prône un libéralisme sauvage dirigé à la baguette par les seuls Etats-Unis. Si les réponses apportées par le bloc réactionnaire ne feront que plonger encore un peu plus les populations modestes dans la précarité, la Gauche doit être capable de répondre à cette aspiration populaire légitime : celle que chacun trouve sa place dans un monde où l’écart entre les plus riches et les plus pauvres ne fait que se creuser. Celle, aussi, du renouvellement des systèmes politiques.

Enfin, les premières analyses sociologiques du vote pour les deux candidats témoignent des profondes fractures territoriales qui minent la cohésion sociale aux USA mais comment ignorer que la France et l’Europe plus largement sont confrontées aux mêmes logiques qu’il nous faut combattre.

Un électorat blanc, plus âgé, plus riche, rural, masculin a largement voté pour le candidat républicain. Mais sa victoire est plus le résultat du manque flagrant de mobilisation de tout le reste de l’électorat en faveur de la candidate démocrate. Sur ce point, il est temps de tirer les leçons de ces suffrages successifs. Toutes les défaites des gauches européennes lors des élections nationales ou locales s’analysent par l’absence ou l’insuffisance de mobilisation des catégories populaires, des jeunes et des forces vives de la société.

François Hollande avait su, lors de sa campagne présidentielle, susciter un espoir, notamment dans les quartiers populaires. Force est de constater que 2012 est maintenant loin et que le désamour s’est installé.

Alors que nos institutions, affaiblies, semblent démontrer les limites de la Ve République, que la parole xénophobe et raciste se libère et que le bloc de gauche sombre dans la résignation d’une défaite à venir, le sursaut est nécessaire et urgent !