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Embrouille sur la dépense publique, plan CAP 22 : l’agenda de moins en moins caché du gouvernement pour détruire notre système social

Publié le vendredi 25 mai 2018

Les déclarations de Bruno Le Maire ont fait un certain bruit ce dimanche : « Le volet social, c’est 50 % de la dépense publique. Expliquer qu’on va réduire la dépense publique sans rien toucher aux aides sociales, ce ne serait pas cohérent et pas juste ni lucide vis-à-vis des Français ».

Il y a tout d’abord une confusion volontairement entretenue entre le volet social et les aides sociales. Si les dépenses « sociales » représentent effectivement un peu plus de la moitié des dépenses publiques (56,4%), les « aides » à proprement parler, essentiellement les allocations familiales, les allocations de lutte contre la pauvreté et les aides au logement, occupent une part relativement faible (11%). Considérer comme des aides le système de retraite ou les prestations d’assurance maladie, alors qu’elles sont le pendant de cotisations payées par les Français, voilà une drôle de vision de la justice sociale !

Ne croyons pas que ces paroles, qu’on tente de relativiser à coup de démentis, soient négligemment jetées en l’air par le ministre de l’Économie. Rappelons-nous des « gaffes » du ministre Macron sur les fonctionnaires, qu’on a retrouvées plus tard quasiment mot pour mot dans le programme du président Macron… Elles révèlent au contraire très profondément la nature de la bataille culturelle engagée par ce gouvernement, qui tente de nous accoutumer à l’idéologie libérale selon laquelle il n’y aurait point de salut hors une réduction sans fin de la dépense publique et des acquis sociaux.

Le programme « Action publique 2022 », ou plan CAP 22, en est l’exemple parfait. Censé constituer la colonne vertébrale de la politique de modernisation de l’État et de transformation de l’action publique, il est d’ores et déjà très critiqué. De par la composition monolithique et très orientée du comité qui y préside tout d’abord : 30 personnalités majoritairement du secteur privé, aucune représentation syndicale ou de la fonction publique territoriale et hospitalière, alors qu’il est chargé d’étudier les possibilités de réformes structurelles dans la sphère publique.

Si les principales mesures du plan CAP 22 ne seront connues que fin mai ou début juin, les résultats seront sans surprise et comme courus d’avance. Les vieilles antiennes déjà servies sous la RGPP de Nicolas Sarkozy, à savoir le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux, la fin d’un statut qui ne serait plus « justifiable » aujourd’hui, nous ne les connaissons que trop bien.

Ce Plan CAP 22 permettra de mettre en œuvre la suppression de 120 000 postes de fonctionnaires et les 60 milliards d’euros d’économies d’ici 2022, afin de répondre aux sacro-saints 3 % de déficit budgétaire imposés par Bruxelles. Après le gel du point d’indice de la fonction publique, la baisse des contrats aidés, l’« obligation de contractualisation » (sic !) pour contenir la croissance des dépenses de fonctionnement des collectivités à 1,2% par an, les nouvelles décisions anti-sociales du gouvernement sont donc attendues en juin.

Qu’on ne vienne pas, ensuite, verser des larmes de crocodile sur les quartiers populaires et sur les carences et défaillances de l’État en Seine-Saint-Denis. Un rapport parlementaire rappelle (encore) qu’il ne met pas les moyens nécessaires pour assurer simplement le droit commun dans notre département, et ce n’est pas avec ce genre de politiques que le rattrapage pourra se faire.

A nous, élus, citoyens, de rester vigilants et mobilisés pour la défense de notre modèle social. Rappelons que c’est grâce à nos mécanismes de solidarité, véritable filet de sécurité contre la pauvreté, que nous avons relativement peu souffert – comparativement à d’autres pays – de la grave crise économique et financière d’il y a dix ans et dont nous nous relevons à grand peine.

Au delà de cela, il nous revient de réfléchir, et de construire, un nouveau projet de société qui nous protège face aux grandes mutations à l’œuvre, avec la numérisation de l’économie, les ruptures de carrières professionnelles. Toutes ces grandes tendances peuvent être synonymes de nouvelles précarités que nous devons anticiper afin de créer notre modèle social de demain et d’améliorer nos conditions de vie.