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Il faut passer du « Central Park du Grand Paris » à un projet partagé par tous

Publié le mercredi 13 mai 2015

Il y a quelques semaines, l’architecte Roland Castro, a rendu publique sa proposition de « Central Park du Grand Paris », un projet « fou » dans sa démarche comme dans son ampleur: déplacer vers le nord-est la centralité du Grand Paris en construction, bâtir 24.000 logements directement autour du parc Georges Valbon, en Seine-Saint-Denis, en lien direct avec la nature, apportant ainsi une solution massive à la crise du logement par une forme urbaine qui se veut hautement qualitative.

S’il avait d’abord été accueilli avec curiosité et intérêt, peu à peu et en particulier depuis que l’Etat l’a inscrit dans la liste possible des Opérations d’Intérêt National, le projet Castro nourrit maintenant un débat passionné.

Dans ce débat, mettons de côté les postures non dénuées d’autres intérêts – électoraux il y a quelques semaines et liés aux Jeux Olympiques maintenant – j’aurais l’occasion d’y revenir. Attachons-nous plutôt aux inquiétudes sincères et rappelons quelques convictions solides.

D’abord, ce projet n’est rien d’autre qu’un scénario, une initiative privée qui n’engage personne sinon ceux qui l’ont initiée.

Le projet imaginé par Roland Castro et ses équipes a pourtant une qualité majeure: il démontre ce que nous savions. Le parc Georges Valbon est enserré par des axes de transport, des voies rapides. Il a été imaginé et aménagé au temps du « tout voiture », les accès y sont complexes, parfois dangereux, de nombreux parkings cernent chacune de ses entrées. Le parc Georges Valbon a une anomalie: les jeunes qui grandissent à la Cité des 4000 de La Courneuve ou Thorez à Dugny, voient de leurs fenêtres les arbres et les allées mais ne peuvent pas y accéder à pied ou à vélo facilement.

Habitant de La Courneuve depuis toujours j’ai vu notre parc se bâtir, peu à peu, et j’y ai, comme tous ses usagers, des habitudes et des souvenirs. Aujourd’hui, président du conseil départemental, je le dis très clairement: ce parc est un espace commun, ce n’est pas une friche ou du foncier disponible. Il appartient d’abord à tous ses usagers et il n’est pas à vendre.

Dans ce projet, il faut donc en finir avec les objectifs ou les références que nous ne partageons pas: rayer les objectifs démesurés de logements, les dizaines d’hectares engloutis. Se débarrasser, également, de tout ce que véhicule cette référence au parc et à l’aménagement New Yorkais: l’élitisme, le luxe et la démesure urbaine, tout ce que la Seine-Saint-Denis n’est pas et ne sera jamais.

Il faut clore ce débat et commencer un nouveau projet, notre projet pour un parc qui doit être respecté, préservé et qui doit être relié à la ville, qui doit entrer dans la ville.

Celui-ci est d’abord un horizon singulier, une beauté rare et sensible, le plus vaste espace vert aménagé de la métropole. C’est également tout un écosystème, classé Natura 2000, des espèces sauvages parfois rares et protégées.

Ce parc est aussi un projet politique: chaque jour il s’y croise de nombreux sequano-dyonisiens de toutes les origines, de milieu social, économique ou culturel différents. C’est un espace de proximité, naturel et authentique, aménagé pour les familles mais aussi un outil d’éducation populaire à l’environnement pour comprendre et mieux protéger le monde du vivant.

C’est enfin une part de notre histoire collective. Depuis près de 50 ans, le Conseil départemental en est l’unique propriétaire et aménageur. Cette nature « reconstruite » est notre bilan partagé entre les majorités successives qui ont animé notre collectivité.

Pour ces trois raisons, nous devons donc faire un projet pour améliorer l’aménagement de ce parc, ses franges, son accessibilité, son lien à la ville mais aussi les équipements en son sein. Il faudra le faire d’abord et avant tout en partant des besoins de la population: besoin d’espaces verts, besoin de logements, besoin de transports, besoin d’une ville plus agréable à vivre où la nature a sa place.

Il faut donc commencer par aller jusqu’au bout du projet initial du parc Georges Valbon qui intégrait dès sa conception l’objectif d’un recouvrement de ces limites, d’un effacement des coupures, des cicatrices.

Alors oui, à la faveur d’un projet d’aménagement – lié ou non à l’accueil des Jeux Olympiques – l’objectif doit être la couverture, l’enjambement de l’autoroute A1, pour améliorer l’accès aux espaces verts mais aussi l’apaisement du trafic sur les voies à grande circulation.

Je crois également à la reconstruction d’un tissu urbain par une programmation de logements mixtes et de qualité. Où construire? Comme cela a déjà été fait à Stains, quartier des Trois-Rivières. Le long du parc et sur ses franges, il y a là des potentiels – je pense par exemple à la RN301 avenue Roger Salengro à La Courneuve depuis la future gare du métro du Grand Paris Express des Six-Routes – en retravaillant par exemple les entrées du parc et leurs liens avec la ville.

Nous avons aussi commencé à y travailler en lançant une grande consultation internationale pour l’aménagement de l’ancien site dit des Essences, autrefois lieu de stockage d’hydrocarbures enclavé à proximité du parc, un terrain vague de 13 hectares qui sera desservi dès 2017 par une gare du Tram Express Nord. Nous avons proposé aux urbanistes du monde entier d’y réfléchir et d’imaginer ici un quartier métropolitain exemplaire, aux plus hauts niveaux d’exigence environnementale.

C’est ainsi, avec la population, avec les élus locaux que nous construirons ce que les « pères fondateurs » du parc souhaitaient faire: un lien généreux entre la ville et la nature.

Ainsi, nous ferons la ville que nous voulons tout en respectant notre parc. Car il est notre héritage : nous l’entretenons puis nous le confierons à ceux qui nous suivront.

Tribune publiée le 12 mai 2015 sur le site du Huffington Post

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