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L’Etat doit assumer la solidarité nationale, renationalisons le RSA

Publié le vendredi 13 novembre 2015

Tribune publiée sur le Huffington post 

POLITIQUE – En 2004, les lois Raffarin ont transféré de l’Etat aux Départements le financement et la gestion du RSA. Depuis, la crise économique a fortement alourdi la facture sociale, particulièrement dans un département populaire comme la Seine-Saint-Denis. Notre département compte aujourd’hui plus de 100.000 allocataires du RSA, contre 50.000 en 2004.

Dans le même temps, l’Etat n’a pas compensé cette hausse de dépenses, que le Département doit donc chaque année un peu plus financer sur son propre budget. Rien qu’en 2014, ce sont 188 millions d’euros que nous avons assumés à la place de l’Etat et qui pèsent comme une lourde contrainte.

Le sujet n’est hélas pas nouveau. Avant 2012, nous le dénoncions et Nicolas Sarkozy faisait la politique de l’autruche. Depuis, le problème est enfin reconnu et de premières mesures ont été prises en 2013 pour nous permettre de boucler, quoique difficilement, nos budgets. Mais ces premières mesures ne sont déjà plus à la hauteur de ce que nous devons assumer.

Cette situation est intolérable et constitue pour la Seine-Saint-Denis une double injustice.

Injustice d’abord car le système fait peser lourdement la solidarité nationale sur les habitants des territoires les plus pauvres : pour un même RSA versé de 524 euros, 152 euros viennent de la poche des séquano-dionysiens, quand dans les Hauts-de-Seine 74 euros seulement sont assumés par le département. Le constat est sans appel.

Injustice ensuite car en étranglant mécaniquement nos finances, ce système aberrant nous oblige à réduire nos capacités d’investissement pour des projets d’avenir. Non, nous ne renoncerons pas, pour pallier une solidarité nationale défaillante, aux investissements dans nos collèges dans le département le plus jeune de France. Non, dans le département d’Ile-de-France où les usagers utilisent le plus leur voiture de manière contrainte, nous ne différerons pas les investissements en terme de transports collectifs ou de route. Nous refusons ce mauvais choix entre investir pour l’avenir ou assurer la solidarité.

Certains à droite semblent découvrir la question et proposent aujourd’hui de mauvaises réponses: ne pas budgéter les versements du RSA ou encore un RSA au montant fixé localement et différent selon les départements ! Ce serait soit prendre les plus fragiles en otage, soit accepter qu’on soit moins aidé dans un territoire pauvre que dans un territoire riche. Ces fausses solutions, qui aggraveraient les injustices actuelles, ne sont pas notre conception de la solidarité dans la République.

Aujourd’hui, le temps n’est plus au diagnostic qui est partagé par tous, jusqu’à la sourcilleuse Cour des Comptes, ni aux bricolages de fortune. Il y a urgence ! Le gouvernement doit prendre conscience de l’étranglement financier des acteurs locaux, mesurer les conséquences que cela entraîne pour les populations et les territoires et prendre maintenant les décisions qui s’imposent.

Nous avons fait et nous continuons de faire des efforts pour que l’argent public soit utilisé au plus juste. Mais il n’y a désormais qu’une seule voie pour une solution durable et globale : la renationalisation du financement du RSA. C’est la mesure de justice que nous demandons pour remettre de l’égalité et de la solidarité dans les territoires et nous permettre d’assurer notre politique d’investissement.

Tribune signée par:
Stéphane Troussel, Président du conseil général,
Belaïde Bedreddine, Président du groupe communiste, citoyen, Front de gauche,
Frédérique Denis, Présidente du groupe Europe Ecologie – Les Verts
Mathieu Hanotin, Président du groupe socialiste, radical et Gauche citoyenne